
Énergie solaire au Burkina Faso : une trajectoire maintenue malgré un contexte sécuritaire difficile
Historiquement dépendant des importations d’électricité, le Burkina a fait du solaire un pilier de sa politique énergétique. Depuis la mise en service de la centrale de Zagtouli en 2017 comme 1er projet solaire connecté au réseau national, le pays a multiplié les initiatives pour attirer les investisseurs privés et développer son marché.
Alors que le Burkina Faso fait face à une crise sécuritaire prolongée et à une transition politique incertaine, le secteur énergétique solaire affiche une vitalité remarquable. Dans un pays sous pression, la multiplication des projets d’énergies renouvelables soutenus par des développeurs privés, des bailleurs de fonds multilatéraux et les autorités nationales dessine les contours d’une résilience énergétique en construction.
Une série d’annonces malgré les risques
Le 29 juillet 2025, le français Qair a sécurisé un financement de 17,2 millions d’euros pour développer une centrale solaire de 18 MW à Dédougou. Le montage associe un prêt de 11,2 millions d’euros de la banque de développement des Pays-Bas (FMO) et un appui concessionnel de 6 millions € du SEFA, le fonds de la Banque africaine de développement pour les projets verts. Ce projet adossé à un accord d’achat d’électricité de 25 ans avec SONABEL fait suite à la centrale de Zano (24 MW) inaugurée en décembre 2023.
Qair n’est pas seul à parier sur le pays ouest-africain. Gutami Holding prévoit 150 MWc d’énergie solaire avec 50 MW de stockage à livrer d’ici 2027. De son côté, AMEA Power a mis sous tension 26,6 MW de capacité solaire à Zina en mai 2024. À Donsin, un projet de 25 MW avec 5 MW/20 MWh de stockage sera financé par la China Eximbank. Axian complète la liste des développeurs actifs, avec l’acquisition de 95% des parts d’une centrale de 30MWc située à Nagréongo.
Une architecture énergétique structurée
Cette dynamique s’appuie sur une architecture mixte réunissant institutions financières internationales (FMO, SEFA, BOAD, SFI, Eximbank Chine, etc.), producteurs indépendants (Qair, Gutami, AMEA Power, Axian, etc.) et opérateur national (SONABEL), qui continue d’assurer un rôle central malgré les turbulences politiques et les contraintes opérationnelles.
L’État a de son côté posé des jalons industriels clairs, en soutenant la production locale via Faso Energy et en conditionnant les importations solaires depuis 2024. Selon le Global Solar Council, le pays disposait de 200 MW installés fin 2024. Ce chiffre pourrait atteindre 225 MW dès 2026. À cela s’ajoute une stratégie d’électrification rurale ambitieuse, avec un objectif de 50% de couverture en zone rurale d’ici 2028, contre 5,49% en 2022.
Une stratégie énergétique qui se poursuit malgré la crise sécuritaire
Depuis 2015, le Burkina Faso fait face à une crise sécuritaire liée au terrorisme dans le Sahel. Le pays comptait plus de 2 millions de déplacés internes en 2023 selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies. Après deux coups d’État en 2022, une nouvelle charte a prolongé la transition de l’actuel régime jusqu’en 2029. Le retrait de la CEDEAO, puis de l’OIF, marque une rupture avec les cadres régionaux.
Malgré tous ces chocs, la stratégie énergétique nationale tient. Dans ce contexte, le solaire n’est plus seulement une solution énergétique, il devient un marqueur de stabilité et un levier de souveraineté. La régularité des projets prouve qu’un secteur peut fonctionner, même lorsque les repères institutionnels vacillent.