Les Pays-Bas, une opportunité à saisir pour le Maroc sur le marché du cannabis légal

Les Pays-Bas, une opportunité à saisir pour le Maroc sur le marché du cannabis légal

Depuis la dépénalisation du cannabis à usage médical et industriel en 2021, le Maroc met progressivement en place une véritable industrie du cannabis légal. Alors que le pays cherche à valoriser sa production, un accès au marché néerlandais pourrait renforcer ses ambitions sur la scène européenne.

Les autorités néerlandaises étudient la possibilité d’importer légalement du cannabis marocain. Selon les informations relayées le 30 avril dernier par le média espagnol spécialisé Canamo, cette initiative intervient dans un contexte où les coffee shops (établissements autorisés à vendre du cannabis à usage récréatif au détail, sous certaines conditions strictes) néerlandais ont été autorisés à vendre du haschich (forme concentrée de cannabis) étranger jusqu’au 10 juin prochain, en raison des pénuries de produits légaux et des difficultés de production locale. Voici pourquoi cette annonce pourrait représenter une opportunité pour l’industrie marocaine émergente.

Les Pays-Bas veulent supprimer l’approvisionnement illicite de cannabis

Dans le cadre de leur politique de régulation du cannabis, les Pays-Bas ont lancé le « Controlled Cannabis Supply Chain Experiment », un programme pilote qui vise à éliminer l’approvisionnement illicite de cannabis dans les coffee shops. Ce projet, initié dans dix municipalités, prévoit que les établissements de vente ne puissent s’approvisionner qu’auprès de dix producteurs agréés par l’État, assurant ainsi une traçabilité complète de la production à la distribution.

Cette expérimentation, entrée en vigueur partiellement fin 2023 à Breda et Tilburg, et généralisée depuis juin 2024 dans les autres villes participantes, constitue une avancée majeure vers une légalisation encadrée du cannabis récréatif, rompant avec le modèle traditionnel de tolérance qui autorise la vente au détail sans régulation de la production. Depuis le 7 avril 2025, l’expérimentation est entrée dans sa phase principale, qui verra tous les coffee shops concernés vendre des produits issus de la filière légale régulée, d’où le besoin d’importer pour combler le déficit de production de cannabis légal.

Selon les données officielles, cette phase de l’expérience est prévue pour durer quatre ans, allant jusqu’en 2029. Cette dynamique pourrait profiter au Maroc, d’autant plus que le pays d’Afrique du Nord a entamé, le 10 avril dernier, l’exportation de cannabis à usage thérapeutique, à destination de laboratoires pharmaceutiques spécialisés en Europe et en Afrique.

Ce succès enregistré témoigne en outre de la capacité du royaume chérifien à s’aligner sur les standards internationaux pour le cannabis légal issu de la variété locale Beldia, qui est particulièrement prisé aux Pays-Bas en raison de son arôme distinctif et sa forte teneur en cannabidiol (CBD).

Un marché en pleine croissance et une ouverture sur l’Europe

La taille du marché néerlandais du cannabis pour tout usage (usage médical, usage pour adultes et CBD) est la 7ᵉ en termes d’importance en Europe après l’Allemagne, le Royaume-Uni, la France, l’Italie, l’Espagne et la Pologne. Selon les estimations de Prohibition Partners, un cabinet de conseil et d’analyse spécialisé dans les marchés légaux du cannabis, le marché néerlandais du cannabis était évalué à 162 millions $ en 2024 et devrait afficher une croissance annuelle moyenne de plus de 15 % jusqu’en 2028.

L’enjeu pour le Maroc est d’autant plus important avec le cadre légal qui se dessine aux Pays-Bas. Selon la Plataforma Cannabisondernemingen Nederland (PCN), le cannabis marocain représenterait entre 20 et 25 % des ventes dans les coffee shops néerlandais à travers des circuits illicites, une part non négligeable qui pourrait entrer dans le circuit légal au cours des années à venir.

Plus largement, l’intérêt néerlandais pour le cannabis légal produit au Maroc, s’il se concrétise par des accords d’approvisionnement, placerait le royaume chérifien sur la bonne voie pour ses ambitions de croissance en Europe.

D’après la Fédération marocaine de l’industrie et de l’innovation pharmaceutiques (FMIIP), le pays pourrait générer des revenus annuels compris entre 4,2 et 6,3 milliards de dirhams (soit environ 450 et 680 millions USD) d’ici 2028, s’il parvient à capter entre 10 % et 15 % des parts du marché européen du cannabis médical. Pour l’heure, le Maroc en est encore à ses débuts sur le segment des exportations de cannabis légal. C’est seulement en 2023 que le pays a réalisé sa première exportation d’un volume total estimé à 200 kg de résine de cannabis et 10 kg de fleur de cannabis, selon les médias locaux.

Dans un contexte mondial où les politiques sur le cannabis évoluent, l’intérêt des Pays-Bas pour la filière marocaine illustre l’émergence de nouveaux débouchés pour les pays producteurs légaux, à condition de s’aligner sur les standards de qualité et les cadres réglementaires internationaux.

 

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